# 33 Domestication et races: Gènes et comportements – Partie 3

Dans l’article précédent, nous avons parlé de l’impact de petites modifications génétiques dans la domestication et la diversité des races canines.

Mais, qu’en est-il de l’impact de la génétique sur le comportement et y a-t-il des gènes responsables de comportement ?

Et bien la réponse est plus complexe qu’elle n’y paraît. Un gène n’est pas responsable d’un comportement. Un gène code pour une protéine, et comme l’hirondelle ne fait pas le printemps, une protéine ne fait pas un comportement. Je vous propose un petit exemple très simpliste pour vous expliquer la complexité d’analyse de ce type de corrélation :

Imaginez, vous achetez une voiture GPL, mais par chez vous, il n’y a pas de station qui propose de GPL. Il est plus compliqué d’aller chercher du GPL et vous devez faire bien attention à trouver une station régulièrement pour ne pas vous retrouver en panne (ou tout simplement n’utiliser que de l’essence).

De même, vous avez une voiture électrique, un temps défini pour faire votre trajet, mais vous allez devoir vous arrêter en route pour recharger la dite voiture, qui s’est fatiguée plus vite que prévu.

Vous avez une voiture diesel ou essence. Trouver du carburant n’est pas difficile.

Ainsi, prenons deux situations :

-> Situation Ville : Vous habitez en ville, tous les carburants sont faciles d’accès, aucun problème. Vous trouvez même des zones de recharges électriques. Parfait, tout est possible. De plus, vos trajets sont courts, donc quoiqu’il arrive, il n’est pas problématique d’être un peu sur la réserve.

Situation Campagne : Vous habitez en campagne. Effectuer une recharge électrique ou un plein GPL se révèle plutôt complexe. Il est donc nécessaire d’être continuellement être attentif à votre jauge de carburant. Cette vigilance, pour l’exemple, nous allons dire qu’elle vous procure une source de stress journalière, car tous les jours vous devez être attentifs à vos déplacements et à ne pas vous retrouver en panne. De plus, les stations d’autoroutes, où les prix peuvent parfois nous donner quelques cheveux blancs, sont parfois votre seule (onéreuse) option.

Un jour, fatigué, vous ne faites pas attention, vous tombez en panne. Vous appelez votre assurance ou un ami qui pourrait vous dépanner.

Vous retrouvant irrité de ne pas avoir fait attention au plein, il vous dit avec bienveillance «  ou-là, mais tu es tout stressé ? La vie à la campagne, ça ne te réussit pas, et ça te coûte cher».

Le dit ami vit en ville avec sa voiture électrique.

Imaginez maintenant que l’on fasse une étude et que l’on fasse la conclusion de :

« Vivre en campagne, c’est stressant et ça coûte cher».

Et bien les corrélations comportement-génétique présentent le même risque d’interprétation.

Si on vous avait conseillé de prendre une voiture essence ou diesel car vous faites de long trajet, vous n’auriez pas à vous souciez continuellement de votre carburant ? (oui, j’ai tendance moi-même à stresser quand je ne suis pas loin de la réserve) et n’auriez-vous pas fait des économies ?

L’idée ici n’est pas de critiquer les voitures électriques ou GPL (et les spécialistes riraient sûrement de mon analyse enfantine de la comparaison essence, diesel, GPL et électrique). Mais ici, l’exemple est surtout pour vous dire qu’il est très compliqué de faire de la corrélation génétique et comportement.

Pourquoi ?

Et bien dans certaines études, on se repose beaucoup sur les questionnaires de propriétaires (C-BARQ). Bien que représentant une source de données intéressante, il ne reste qu’un questionnaire, et donc soumis au regard subjectif des propriétaires de chien.

L’expérience contient donc un premier biais. Une expérience consiste en des observateurs différents qui prennent des notes selon le même référentiel ou une prise d’information par des appareils de tracking. Concernant le C-Barq, Ce sont des gens différents avec des concepts différents et une vision différente de leurs toutous.

Cela veut dire que, un chien est agressif → on regarde son génome.

Un autre chien est agressif → on regarde son génome.

Des spécificités génétiques correspondent → hum, c’est impliqué dans l’agressivité..

Cependant, la question est : qui de la poule ou de l’œuf est arrivé en premier ?

Et est-ce vraiment de l’agressivité innée? Ou que l’animal n’est pas adapté à l’environnement dans lequel il évolue ?

Ce qui est finalement plus intéressant et plus pertinent à mon sens (mais juste au mien hein), c’est de finalement voir nos toutous comme cet exemple de voiture.

Sont-ils adaptés à l’environnement que je propose ?

Les chiens ont, il est vrai, des spécificités génétiques, épigénétique communes, qui leur confèrent des compétences qui divergent selon les races.

Mais cela relève plus des ‘capacités ‘ du système de départ et à quoi il aspire, à quel fonction il est dédié.

Si vous utilisez un économe pour écraser vos pommes de terre, ou si vous demandez à un écureuil de traverser la Manche à la nage, cela risque d’être compliqué.

Alors, l’idée n’est pas de créer une polémique sur le travail des chercheurs qui est de qualité d’un point de vue statistiques, mais plutôt d’avoir l’esprit ouvert, et de ne pas tomber dans le piège du :

‘C’est la race qui fait ça, car c’est la génétique qui dicte cela’.

Posons peut-être d’abord la question : Est-ce que l’environnement est compatible avec les qualités et compétences de cette race ?

Est-ce que mon chien est épanoui dans cet environnement ? Est-ce que mon chien est dans un environnement où il peut exprimer les compétences pour lesquelles sa génération a été sélectionnée ? Est-ce que moi, humain, j’ai bien compris les besoins de mon poilu  et les besoins de la race que j’ai choisi ?

Ne nous leurrons pas, l’agressivité n’est pas quelque chose de gratuit. L’agressivité est un comportement normal de gestion des ressources et nécessaire à la survie (et bien d’autres choses encore).

Ainsi, bien évidemment, des facteurs biologiques peuvent favoriser l’agressivité, comme l’hyper-tension ou bien d’autres paramètres physiologiques.

Mais cela ne veut pas dire que les hyper-tendus sont agressifs, cela veut dire que les hyper-tendus sont moins résistants au stress.

C’est tout.

Ainsi, quand notre poilu semble prendre une mauvaise pente, évitons de prendre le raccourci de ‘c’est la race qui fait ça’. N’est-il pas plus intéressant de se dire : Hum, est ce que finalement l’environnement que je propose à mon chien est adapté ? Finalement, quelles sont ses compétences ? Puis-je lui proposer de s’épanouir dans ses activités préférées ? Ou est-il restreint à subir le stress de chercher constamment une pompe à essence ?

Cet article est donc avant tout un article de réflexion. Il est important de savoir que le chien est différent du loup, et que les races de chiens sont différentes entre elles. Et surtout garder à l’esprit que ces différences sont fonctionnelles et environnementales. Et que les peurs des uns ne sont pas les peurs des autres.

Et oui, certaines personnes n’ont pas peur de tomber en panne sur la route !

Bibliographie:

MacLean et al., Highly heritable and functionally relevant breed differences in dog behaviour. 2019 Proc. R. Soc. B 286: 20190716.

Zapata et al., Genetic mapping of canine fear and agression, 2016, Genomics, 14:572

Et si tenter le C-BARQ vous intéresse, vous pouvez le faire sur le lien suivant:

https://vetapps.vet.upenn.edu/cbarq/ (seulement en anglais)

Conseils Toutous