Avant de parler du tartre chez le chien, parlons du tartre dentaire tout court, qu’est-ce que c’est ?
Pour comprendre la formation du tartre, il faut en connaître son origine. Lorsque l’on mange, des micro-organismes, dont les cellules vont se coller les unes aux autres, vont se déposer sur nos dents. On appelle cela le biofilm.
Lorsque la salive agit sur le biofilm, elle tue les bactéries et autres micro-organismes, mais laisse les débris cellulaires que l’on appelle la plaque dentaire. Si celle-ci n’est pas bien éliminée par le brossage des dents, cette dernière se durcit pour acquérir une forme minérale que l’on appelle le tartre dentaire.
Ce fameux tartre est composé de deux parties : une partie minérale (40 à 60% de la plaque) et une partie organique (débris cellulaire). Les principaux constituants de la partie minérale sont des phosphates de calcium. La partie organique, quant à elle, est constituée de débris cellulaires du biofilm, des lipides (issus de l’alimentation) mais surtout des protéines. De manière intéressante, les protéines retrouvées dans le tartre sont principalement des protéines salivaires. Ce qui est intéressant ici, c’est que la formation du tartre n’est pas véritablement due aux débris alimentaires, mais plutôt à la salive et aux micro-organismes présents dans la bouche.
A partir de là, on pourrait faire l’erreur de ne pas relier l’alimentation au tartre.
Peu d’expériences ont été menées sur le tartre chez le chien. En 1998, une revue scientifique sur le tartre chez le chien rapporte une étude effectuée sur une population de beagles soumis au même régime alimentaire (croquette). La conclusion fut que, à défaut d’en connaître la véritable origine, le brossage des dents chez le chien reste la meilleure arme contre le tartre. D’autres études plus récentes, menées sur des chiens nourris aux croquettes, montrent que la mastication de bâtonnets à base de fibres améliore considérablement l’hygiène dentaire de nos toutous (je ne cite pas ici cette étude car il est peu probable que cette étude soit indépendante).
Et là, je vois les gros yeux arriver : il faut donc que je brosse les dents de mon chien tous les jours si celui – ci a du tartre ?
Eh bien, non parce que les choses ne sont pas toujours ce qu’elles semblent être… et c’est probablement valable pour les humains aussi.
Si l’on regarde de plus près, on constate que l’apparition du tartre est liée à un dépôt de protéines salivaires et de minéraux d’origine salivaire. C’est donc la salive la responsable. Il faut savoir que, la composition de notre salive est dépendante de notre génétique, c’est un fait et il va falloir vivre avec. Il en va de même pour notre toutou. Et même, on peut aller plus loin. Chez l’humain, l’environnement, le stress et l’alimentation sont des facteurs qui affectent la composition de la salive. Il n’est pas improbable que nos toutous subissent le même traitement.
Mais pourquoi certains chiens ont-ils plus de tartre que d’autres ?
Il y a plusieurs réponses possibles. D’une part, la génétique de notre toutou va avoir un impact sur une partie de la composition de sa salive, mais pas que. Une part sera aussi, et on peut le supposer, liée à l’environnement du chien (stress…). Enfin, on peut peut-être mettre cela sur le compte de l’alimentation.
Et oui, mais de manière indirecte. Je m’explique : les aliments qui font saliver le plus vont être riches en sucres ou en sels principalement (calcium, chlorure de sodium…). Il y a une forte réactivité, notamment sur le sucre, car cela va faire appel aux amylases salivaires notamment, enzyme que le chien aurait acquis pendant la période de domestication (il y a 10 000 ans). Attention, le chien possède des amylases, oui, mais en aucun cas ne lui retire son statut de carnivore omnivore. Le chien ne peut ni être végétarien ni végétalien au risque d’en affecter sa santé. Cela fera l’objet d’un prochain article conseils toutous.
Revenons à notre salive :
Le chien va donc saliver plus ou moins selon son alimentation. Plus celle-ci aura un potentiel de salivation élevé (sucré, salé, gras etc), plus la salive sera abondante. Chez certains chiens, le changement d’alimentation (changement de croquettes, de récompense, de ration etc) peut affecter cette formation de salive. Un vétérinaire américain a étudié les bénéfices du régime BARF chez ses clients, et il a observé que les chiens mis au BARF avaient une forte réduction de tartre. Et cette baisse ne serait pas lié au fait que notre toutou ronge son nonos, mais plutôt au fait que les chiens ont une quantité de glucides dans leur ration qui est fortement diminuée voire éliminée. Il en est de même pour le sel, que l’on retrouve souvent en abondance dans les croquettes ou produits industriels. De plus, dans les nourritures industriels, une véritable recherche est effectuée sur l’appétence de la croquette (exhausteurs de goût, sels, sucres etc…). Et comme chez l’humain, ces additifs viennent agir sur tout ce processus salivaire.
Il est à savoir que les émotions peuvent aussi déclencher une hypersalivation (colère, peur), de même que les odeurs de nourriture.
La restriction d’eau a aussi un impact sur la salivation. Une restriction hydrique induit une diminution de salive. A partir de là, il se peut que sur la quantité de salive excrétée, les enzymes se concentrent. Cependant, il est fondamental de TOUJOURS laisser de l’eau à son chien (sauf si il est potomanique/polydipsisque, c’est-à-dire boit de l’eau compulsivement) bien évidemment, car si le chien a soif et qu’il n’a pas d’eau, cela le stresse , et si cela le stresse, il bave…
Des plus, les croquettes très grasses/sucrées ou salées donnent soif. Si votre chien boit beaucoup, posez-vous la question de la qualité de l’alimentation de votre chien. Donc, pour clôturer cette parenthèse sur l’eau, même si vous apprenez la propreté à votre chien, ne lui retirez l’eau sous aucun prétexte.
Donc, ce qu’il faut retenir sur le tartre, c’est que si votre chien en a beaucoup, il y a peut-être trop de glucides dans vos croquettes, ou trop de sels (ce qui va souvent de pair). Pensez à prendre des croquettes plus riches en protéines (de bonnes qualités -> viande écrit sur le paquet) et moins riches en glucides.
Conseils Toutous
Sources :
https://www.whole-dog-journal.com/issues/3_9/features/5114-1.html
Jin, Y; Yip, H. K. (2002). « Supragingival calculus: formation and control ». Critical Reviews in Oral Biology and Medicine. 13 (5): 426–441.
Gorrel C. Periodontal Disease and Diet in Domestic Pets, Journal of Nutrition and Disease, 128:2712S-2714S 1998
Raymond Gilles, Physiologie animale, 2007, ed. De Boeck