#36 Quand enrichissement rime avec olfaction.

Dans cet article, je vous propose d’explorer un autre type d’enrichissement qui gagnerait à se démocratiser en refuge, l’enrichissement olfactif.

Pour revenir un peu sur la définition de l’enrichissement : Un enrichissement correspond à l’ajout d’un élément exerçant une influence positive (agréable) sur l’organisme. Il est important de garder cette définition à l’esprit lorsque l’on parle d’enrichissement. Si l’ajout est désagréable ou stressant, ce n’est pas un enrichissement.

Ainsi, dans les refuges pour animaux, ces derniers sont souvent exposés à des stimuli inadéquats en termes de qualité et de quantité (hypo/hyperstimulation). Ces conditions sont alors propices au développement de comportements anxieux, voire agressifs . Le problème est qu’en plus d’être indicateur d’un mal être, ces signes diminuent les chances d’adoptions de ces derniers.

Il est donc important d’apporter de l’enrichissement au sein des refuges, tels que des sessions d’entraînement, des éléments d’enrichissements type couverture, panier, jouet, l’ajout de kong farcis etc .. Cependant ce type d’enrichissement représente un coût humain et monétaire souvent trop important pour les refuges.

Ainsi la stimulation sensorielle, et notamment olfactive, a fait l’objet d’études afin de savoir si cette approche pouvait représenter un intérêt pour le bien être des chiens de refuge.

Et ?

Des études ont été menées afin de comprendre l’intérêt potentiel d’un enrichissement olfactif chez les chiens de refuge. Dans ces travaux, plusieurs parfums ont été étudiés, principalement des huiles essentielles. Il en résulte qu’il est important de choisir son odeur.

Les huiles de camomille, lavande, noix de coco, valériane, vanille et gingembre ont présenté un effet calmant, notamment en diminuant la fréquence des aboiements, vocalises, et comportements locomoteurs au profit d’une augmentation des périodes de repos et de calme.

A l’inverse, les odeurs de menthe poivrée et de romarin ont eu tendance à augmenter les aboiements et les comportements moteurs.

Afin de mieux comprendre la procédure, dans une étude publié en 2018 dans Applied Animal Behavior Science, les chercheurs ont investigué l’effet d’une exposition à des tissus imprégnés de 5 gouttes d’huiles essentielles, une à chaque coin du tissus et une au centre. La préparation du tissu est effectuée 60 minutes avant l’exposition et conservée dans un sac plastique propre avant utilisation pour éviter toutes contaminations olfactives. Ainsi, les chiens ont été exposés à chaque odeur 2h par jour sur 3 jours consécutifs, avec deux jours d’intervalles entre les différentes odeurs (conditions). Le tissu est proposé de telle sorte que le chien puisse toucher et interagir avec le tissu.

Le choix du temps d’exposition s’est aussi fait en fonction de l’emploi du temps des animaux du refuge où s’est déroulée l’expérience. L’exposition a été faite de manière à ne pas se dérouler aux périodes où les animaux sont sortis pour une promenade ni lorsque leurs boxes sont nettoyés.

Ainsi, les résultats de cette étude montrent que les animaux, lorsqu’ils sont exposés à des odeurs de vanille, gingembre, noix de coco et valériane, sont plus calmes et moins stressés que lorsqu’ils ne sont exposés qu’au tissu seul.

Ce protocole représente donc une piste intéressante pour améliorer les conditions des animaux dans les refuges, notamment en diminuant leur stress .

Ce qui est d’autant plus marquant, c’est que ces résultats ont été observés aussi bien en l’absence qu’en présence de visiteurs dans le refuge. Ce point est donc intéressant pour le succès des adoptions.

Dans une revue publiée la même année, il est suggéré que les stimulations sensorielles apaisantes, d’ordre générale (olfactive et auditive principalement), pourraient présenter de nombreux avantages notamment durant la période de transition refuge – maison de l’adoptant.

L’utilisation de stimulus apaisant durant la période de transition entre le refuge et la maison de l’accueillant pourrait constituer une piste intéressante à explorer concernant le succès de l’adoption. Généralement, la première semaine d’adoption représente une période critique durant laquelle les chiens peuvent être renvoyé au refuge pour cause de destruction, vocalisation importante, hyper-vigilance etc..

Sans être complètement établi, car de nombreux points et questionnements restent encore en suspens quant à l’efficacité de ce type d’approche, notamment en raison du faible nombre d’étude sur le sujet, l’enrichissement olfactif représente aujourd’hui une piste intéressante et abordable en terme d’investissement économique et humain afin d’améliorer le bien-être des animaux en refuge.

Cependant, il reste important de vérifier les préférences de chacun avant d’intégrer une nouvelle odeur, car les goûts des uns ne font pas ceux des autres.

Bibliographie :

Lynne Graham, Deborah L.Wells and Peter G.Hepper, The influence of olfactory stimulation on the behaviour of dogs housed in a rescue shelter Applied Animal Behaviour Science, Applied Animal Behaviour Science 91 (2005) 143-153

Johnathan Binks, Sienna Taylor, Alison Wills, V. Tamara Montrose, The behavioural effects of olfactory stimulation on dogs at a rescue shelter, Applied Animal Behaviour Science 202 (2018) 69–76

Giacomo Riggio, A review on the effects of sensory stimulation in shleter dogs, Dog Bheavior, 2018-1, 25-35.